Depuis 1892, la droguerie Taverne se situe au numéro 14 de la Rue Saint-Antoine du T. Nichée au cœur de Toulouse, cette boutique a vu défiler de nombreuses générations de toulousain·e·s. À l’approche du 130ème anniversaire de cette institution, Toulouse Secret a décidé de vous en dire plus sur la droguerie Taverne.
Quand la droguerie Taverne n’était encore qu’une entreprise de peinture
Cette droguerie, c’est bien évidemment une histoire de famille, celle d’une entreprise qui se transmet de génération en génération. C’est aussi, un peu plus discrètement, une histoire de femmes. Mais commençons par le commencement. Béatrice Espinasse – qui est aujourd’hui aux commandes de la droguerie Taverne – nous raconte (non sans fierté) l’histoire de sa famille d’artistes à qui l’on doit cette véritable caverne d’Ali Baba. En 1892, son arrière-grand-père installe au 14 de la rue Saint-Antoine du T une entreprise de peinture.
Lui-même artiste diplômé des Beaux-Arts et peintre spécialisé dans le trompe l’œil et le lettrage de panneaux publicitaires, il fait de ce que l’on connaît aujourd’hui comme une droguerie, une entreprise de peinture. Ainsi, le premier rôle de la droguerie Taverne était de vendre des pigments en poudre, de la cire, de l’essence ou encore de l’huile en vrac afin que chacun puisse fabriquer sur place sa propre peinture…
Une histoire de f(em)mille
Et comme on le sait tous, derrière chaque grand homme se cache toujours une femme. Quand l’arrière-grand-père partait peindre sur les chantiers, c’est donc l’arrière-grand-mère de Béatrice qui passait derrière le comptoir. C’est elle aussi qui accueillait les clients et leur remettait les denrées qu’ils étaient venus chercher. Parmi ces clients, des clientes qui – de plus en plus nombreuses – venaient demander des petites quantités des produits qui serviraient à l’entretien de la maison.
Comme le dit Béatrice, son arrière-grand-mère était “une femme intelligente qui avait de la tête et était très dégourdie”. En quelque sorte, c’est elle qui a su développer le commerce et transformer petit à petit la boutique en droguerie. Puis la guerre est arrivée et de moins en moins d’hommes en sont rentrés… La droguerie Taverne est donc passée des mains de l’arrière-grand-mère à celles du grand-père de Béatrice, un excellent joueur de violon qui a continué à faire tourner la boutique.
La droguerie Taverne : l’Art et la matière
Vous l’avez probablement deviné, la famille Taverne est une famille d’artistes. L’arrière-grand-père était peintre, le grand-père jouait du violon, la mère chantait et faisait du théâtre et Béatrice a elle-même dansé au Capitole. Mais le véritable art que la famille s’est transmis en héritage est probablement celui du contact humain. Depuis 1892, la droguerie Taverne a vu passer de nombreux clients, dont une majorité qu’elle a su fidéliser. Béatrice nous confie “ce qu’ils ne trouvent pas ailleurs, ils viennent le chercher ici et ce qu’ils ne trouvent pas ici, ils ne le trouveront pas ailleurs”. Certes, à la droguerie Taverne on y trouve déjà beaucoup de choses.
Des produits pour l’entretien de la maison, celui du linge, du cuir, du bois, des produits d’hygiène et des articles de toilettes ou encore des ustensiles de cuisine et de la quincaillerie de dépannage. Mais ce que les gens viennent avant tout chercher, ce sont des conseils. “Les clients aiment venir partager, parler, avoir un contact. Ici c’est un lieu de vie, il y a des chaises pour s’asseoir depuis mon arrière-grand-père ! Certains clients achètent un morceau de savon pour le principe et restent pour discuter. Il y a un affectif. Les générations se sont succédées. Les enfants venaient avec leur grand-mère et maintenant qu’ils sont adultes, ils viennent toujours, pour la nostalgie du lieu, pour l’ambiance, pour l’accueil qui est le même, pour les odeurs…”
On vous parle d’un temps que les moins de 30 ans…
130 ans ça se fête ! Béatrice pense organiser un événement pour l’occasion, mais elle garde la tête sur les épaules : “c’est à voir avec ce covid”. Il y en aurait pourtant des choses à fêter à la droguerie Taverne. D’abord, la préservation d’un patrimoine où articles anciens côtoient des produits dernier cri. Cet attachement au passé qui ne tombe pas non plus dans l’écueil du “c’était mieux avant”.
Des souvenirs chéris et des secrets bien gardés, comme la pièce secrète qui servait de bureau au comptable et qui abrite maintenant les caisses de pinceaux, les brosses, les accessoires de peinture, les feuilles à dorer et les assiettes à dorer de l’arrière-grand-père de Béatrice. On y trouve aussi un aménagement muséal avec des affiches vintages et des flacons de l’arrière-grand-père. Le “mur des ancêtres” – comme l’appelle Béatrice – avec photos et coupures de presse de l’époque pour maintenir une atmosphère que les clients adorent…
La 5ème génération prendra-t-elle la rèleve ?
Mais la relève devra bien venir un jour. Peut-être que Sébastien (le fils de Béatrice et 5ème génération de Taverne) et sa fiancée (qui adore l’endroit) reprendront les lieux ? Il y a déjà travaillé 5 ans et à créé la page Facebook, et le compte Instagram de la droguerie.
Une présence indispensable sur les réseaux sociaux qui n’est pas sans déplaire à Béatrice. Et même si le fils ne reprend pas la droguerie, Béatrice – que ses clients surnomment “la Bonne Fée” – reste optimiste : “ il y aura toujours quelqu’un pour faire vivre le lieu !”. Cette droguerie Taverne qui a vu passer Claude Nougaro, les chevaliers du Fiel, Michel Sarran (à quelque occasions) et des milliers de toulousain·e·s d’hier et d’aujourd’hui a encore de belles années devant elle et promet de rester encore de nombreuses années dans le paysage de la ville Rose !